



Série Préfigure, 2015
La peinture de Varozza a carte blanche
Il y a les peintres qui aiment le blanc et ceux qui ne l’aiment pas.
Les premiers occupent l’espace, le remplissent et l’envahissent. Ils font le maximum de bruit avec leurs formes et leurs couleurs. Ils sont des adeptes de l’affirmation, de l’opposition, de la fixité, du dur et du stable.
Les seconds acceptent le vide et le silence. Ils laissent leur pensée aller dans le flux, dans le courant.
Les premiers sont les rochers et les rives de la rivière.
Les seconds sont l’eau ondoyante, vibrionnante, qui passe, qui ne fait que passer, fluide, souple, sans s’attarder.
La peinture de Varozza est pleine de blanc.
Elle hisse le drapeau blanc, elle ne mène pas le combat, elle ne cherche pas la bagarre, elle ne part pas en guerre, elle n’est pas hostile.
La peinture de Varozza a carte blanche, c’est-à-dire qu’elle ne suit pas les instructions. Elle doit trouver à chaque fois sa propre application. Elle ne craint pas de se perdre. Elle n’a pas peur de s’égarer. Elle est aventureuse. Elle n’a pas besoin de se rassurer et de se tenir avec les mains contre les parois solides pour ne pas tomber. Elle est musicale, in the mood. Elle fait partie de ces choses difficiles à expliquer, comme le feeling. Elle raconte des histoires mais on ne sait pas très bien lesquelles.
La peinture de Varozza reste toujours sur la réserve, et le blanc de la toile est sa réserve. Elle a un secret.
Pierre Tilman, Janvier 2016