Varozza

Sa peinture est temporelle. C’est une peinture du commencement. Qui volontairement s’inachève et se poursuit dans un après. Qui s’ennuage de couleurs. Et s’esquisse de traits. Larges et amples. Laissant aller.
Son temps est jeune comme ce qu’elle initie. Des tendresses de style. Des froissés de couleur. De larges blancs de toile.
Il l’appelle « préfigure » insistant sur l’avant. Et sa légèreté. Car il refuse toute fin immobilisant l’espace. Figeant le temps.
L’accompli n’a plus à être. Puisqu’il n’a plus à devenir. Or ce qu’il cherche, lui, est l’instant de l’amorce. La seconde inspirée. Le moment du vertige. Où quittant tout essai, l’œuvre s’apprête à naître. S’apprête précisément. Sans définition.
Sans figure affirmée. Juste une préfigure. Soufflant sa vie prochaine. Et laissant que survienne ce qui est déjà là. Affleurant. Proche. Et néanmoins absent. Car c’est là la tension. Qui seule exprime l’être. Il le sait. N’apparaissant qu’à un point d’équilibre. Entre absence et présence. Et dans la projection.
C’est là le difficile avec le temporel. Lancer la création et l’arrêter à temps pour qu’elle se poursuive. Et qu’elle existe encore sous chaque regard plein. C’est ce qu’il a compris et tente de transmettre : que le temps est toujours dans l’encore à venir. Dans l’attente de l’être et de ses impatiences.
Là et non là. Mais là néanmoins.
C’est pourquoi les œuvres peuvent rester longtemps ni titrées ni signées. En puissance d’elles-mêmes. Ce blanc est leur mémoire. Jusqu’à ce qu’elles trouvent acte et représentation. Et qu’il déclare en elles le fait de leur naissance.
Le sens de sa création.

Claude Montserrat, Nice 22 octobre 2016